Violence armée: les enfants doublement victimes

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La situation délétère qui se développe au cœur de la capitale met la vie et l’éducation des enfants en grand danger. Le climat de violence inouïe a de graves conséquences sur la santé mentale des enfants exposés aux actes de cruauté des bandits armés. Ce qui risque de compliquer leur intégration sociale et hypothéquer leur avenir.

Concert de cartouches, des bâtiments en feu, des cadavres en pleine rue, des démonstrations de forces des groupes armés, telle est la réalité qui rythme la zone métropolitaine de Port-au-Prince ces derniers jours. Cette situation chaotique n’épargne aucune couche ou groupe dans la société. La violence armée impacte négativement la santé physique et psychologique de la population, même les enfants. Alors que cette devrait être hors de portée de ces types de danger.

CP : Ted’Actu

Récit glacial d’un enfant

M. Mario revient sur cette scène qui l’a marquée la semaine dernière avec son fils de 8 ans. Cette famille qui habite Clercine, commune de Croix-des-Bouquets, depuis plusieurs années. Cette zone qui est dans le viseur des groupes armés, ne cessent de subir des attaques armées et les bandits armés prennent plaisir à faire des démonstrations de force pour prouver leur puissance.

« La semaine écoulé, il a eu des affrontements sanglants entres les forces de l’ordre et les bandits. On est resté à la maison. À un moment, mon fils est venu vers moi pour me dire qu’on va mourir. Je lui ai dit que non, mais il a persisté. A ce moment-là, je l’ai pris dans mes bras pour le rassurer que tout va bien », nous raconte le père de l’enfant.

Reuters

Le calvaire du fils de Mario n’est qu’un échantillon si l’on considère le nombre exponentiel d’enfants exposés aux actes de violence et qui en subissent les traumatismes. Ils entendent de forte crépitement d’armes dans leur quartier, ils assistent à des affrontements sanglants, ils voient des cadavres qui jonchent les rues de la capitale. Le pire, même si ces enfants restent cloîtrés chez eux, ils sont exposés à l’horreur à travers les réseaux sociaux.

L’enfance volée

Alors qu’ils devraient étudier, jouer, aller à l’école, vivre leur enfance et s’épanouir au sein de leur communauté, les enfants vivent dans la peur, le stress. Sans épanouissement aucun et dans l’insécurité totale. Les parents ne tiennent pas toujours compte de l’âge développemental de l’enfant, de reconnaître que les enfants peuvent être affectés et impactés par la situation qui prévaut actuellement en Haïti.

Tout comme cette famille, les parents sont incapables de protéger ou éviter à leurs progénitures de vivre ces événements on ne peut plus traumatisants. A force de vivre et revivre ces épouvantes réalité, les enfants ont de fortes chances d’être affectés mentalement. Ces conséquences néfastes risquent de persister jusqu’à l’âge adulte.

La vulnérabilité psychologique des enfants

Angoisse, peur, préoccupation, problème de concentration et de mémoire, baisse au niveau du rendement académique, des comportements violent ou agressif sont, entre autres, signes visibles de l’impact négatif de la violence armée sur les enfants, d’après les explications du Dr Pascal Nery Jean Charles.

Les enfants vivent dans une tension permanente liée à cette insécurité et expriment une grande anxiété. Selon la psychologue, Johanne Refuse, les événements stressants font partie intégrante de la vie de l’enfant, et la plupart des jeunes apprennent à les surmonter. Toutefois, des événements majeurs, tels qu’une agression physique ou sexuelle, un enlèvement ou une fusillade, ont généralement à plus long terme des conséquences sur le bien-être physique et psychologique des enfants, donc leur santé mentale.

 » Quant aux enfants qui grandissent dans un contexte de guerre, (par exemple : attaque des gangs armés sur la population haïtienne) ils peuvent subir des dommages psychologiques encore plus dévastateurs comme des symptômes post-traumatiques surtout si l’expérience traumatisante est prolongée, répétée, chronique et de surcroît vécue avec impuissance et horreur et que la qualité de l’environnement n’est pas constante, contenante et sécure », poursuit la spécialiste.

 » Compte tenu de leur rythme de vie actuelle et du stress qu’ils ressentent, il n’est pas étonnant que l’anxiété ait beaucoup augmentée chez les enfants. Dans ma pratique clinique auprès des jeunes, la peur du danger et de la mort constitue l’une des peurs la plus fréquente chez les enfants de tout âge. Ils vivent une expérience de danger soudaine, grave et imprévisible qui pourrait provoquer chez certains enfants un dérèglement du fonctionnement émotionnel, cognitif et comportemental « , a fait savoir la spécialiste en psychologie clinique et dans le développement de l’enfant.

Recommandations des psychologues

La première mesure de protection est la restauration d’un environnement de sécurité autour de l’enfant. La présence parentale ou celle de figures d’attachement principales, et l’assurance concrète qu’il est actuellement en sécurité et hors de danger. Les parents doivent retenir qu’il est toujours possible pour les enfants et même pour eux-mêmes de se reconstruire, de pouvoir renouer avec des relations positives, de développer des ressources et de pouvoir se réaliser en tant que personne et de réaliser aussi son potentiel.

Les parents doivent être à l’écoute de leurs enfant, leur offrir une disponibilité dans le but de leur garantir une présence physique et émotionnelle.

Mais surtout, dans les familles, il faut éviter les confrontations et les discussions délicates avec les enfants quand vous vous sentez vous-même fatigués ou irrités, et soyez à l’écoute de vos propres signaux d’alerte comme vous apprenez à le faire à vos enfants.

Mederson ALCINDOR
Vant Bèf Info (VBI)

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