Bienvenue en Haïti : 150 mille gourdes pour un passeport !

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L’incapacité de la Direction de l’Immigration et de l’Emigration (DIE) à délivrer à temps le fameux document, désormais très demandé, empêche à des milliers d’haïtiens de participer au programme « Humanitarian Parole » initié par le gouvernement américain. A cause de cette situation, les citoyens paient des sommes faramineuses pour avoir leur passeport.

Port-au-Prince, le 29 mars 2023.- L’annonce du programme Humanitarian Parole communément appelé « Programme Biden », le 6 janvier 2023 par l’administration américaine, a eu l’effet d’une manne tombée du ciel en Haïti.

Tout le monde s’empresse de se faire procurer de ce document de voyage qui, même en temps normal, n’était pas chose facile. Des interminables files d’attentes sont remarquées devant les locaux du bureau central de la DIE. Même cas de figure, au niveau des Centres de Réception et de Livraison des Documents d’Identité (CRLDI).

A mesure que le temps passe, les demandes sont de plus en plus nombreuses. Le gouvernement peine à délivrer ce fameux document de voyage à ses citoyens. A longueur de journée, sous un soleil de plomb, les gens se bousculent. Certains passent des nuits devant les locaux des bureaux de l’immigration dormant à la belle étoile.

Une entreprise très rentable
Face à la faiblesse des structures impliquées dans la délivrance de ce document qui devient de plus en plus important pour des haïtiens, des agences de voyage ambulantes ont vu le jour, sans oublier celles qui sont régulièrement enregistrées. Des individus communément appelés « racketteurs » font la navette devant les CRLDI, et marchandent leur service aux plus offrant.
Avec eux, il n’y a pas de temps à perdre. C’est à prendre ou à laisser. Le prix varie entre 25 jusqu’à 50 mille gourdes pour produire la demande. Ensuite, il faut attendre entre 15 et 30 jours pour la livraison. C’est le même cas de figure pour les agences. « Un passeport n’a pas de prix. Le prix varie en fonction de la personne de contact », déclare junior, un jeune qui dit avoir payé plus de 40 mille gourdes pour se le procurer.

Des citoyens avouent avoir payé entre 100 à 150 mille gourdes dans des circuits parallèles. D’autres, pour la plupart des femmes, disent avoir été victimes d’harcèlement sexuel dans les bureaux de l’Immigration en dépit des fortes sommes versées. C’est le cas d’une demoiselle vivant dans la Commune de Belladère dans le Département du Centre.

Des policiers et agents de l’immigration font leur beurre
Hormis les agences et les racketteurs, des agents de la Police Nationale d’Haïti et des employés de la DIE tirent des avantages juteux dans cet état de fait. Un policier en uniforme fait payer au moins 10 mille gourdes à une personne, seulement pour faciliter son entrée dans l’enceinte d’un bureau de l’immigration et de l’émigration, témoignent des citoyens. Pour y arriver, ces agents font usage de leurs armes à feu et de gaz lacrymogène pour intimider la foule.

A chaque étape du processus, le demandeur de passeport doit verser un montant soit à un policier (passeur) ou un agent de l’immigration. Des citoyens déclarent avoir dépensé 5 000 gourdes seulement pour la prise de photo. Même dans les bureaux de province, le constat est alarmant. Des policiers, en passant par les employés, jusqu’aux directeurs des centres, chaque personne qui dispose de pouvoir en ce sens, fait passer des dizaines de personnes sans aucun respect pour le public.

La situation est globalement hors de contrôle et échappe totalement aux autorités au plus haut niveau de l’État. Si rien n’est fait, ce dossier risque de créer des antécédents regrettables. Ce mercredi 29 mars, plusieurs personnes ont été blessées par balles lors d’échauffourées dans le CRLDI de Tabarre impliquant des agents de la PNH.

Il faut rappeler que sur un total de plus de 11 mille personnes approuvées pour le programme Humanitarian Parole, moins de 6 000 seulement, faute de passeport, sont arrivés aux États-Unis, rapporte une institution américaine.

Vant Bèf Info (VBI)