Centre-ville de Port-au-Prince : portrait d’une ville chaotique

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La peur s’installe à Port-au-Prince, devenue le théâtre croissant de scènes de pillage, de vandalisme et d’incendie depuis plus d’un mois. Cette atmosphère de chaos, orchestrée par la coalition de gangs « Viv Ansanm », teint la capitale de sombres couleurs. Port-au-Prince devient peu à peu une ville, capitale fantôme.

Port-au-Prince, 9 avril 2024- Depuis plus d’un mois, la capitale haïtienne est prise en otage par les gangs armés. Ces derniers tuent, vandalisent sans crainte, pillent et incendient une panoplie d’institutions publiques et privées ; même les postes de police ne sont pas épargnés. Les hommes armés réunis sous le label «Viv ansanm» font parler la poudre et sèment la pagaille à longueur de journée dans l’aire métropolitaine de Port-au-Prince. I’m

Une capitale défigurée

En quittant la zone Sud pour rentrer au Centre-ville de Port-au-Prince, à partir de Portail Léogane, lieu de concentration autrefois, un air terrifiant souffle comme dans les films d’horreur. Contrôlée par plus de trois (3) bandes armées, cette rentrée n’a plus de poste de Police après qu’ils ont tous été incendiés. En divers recoins, on peut même constater des corps sans vie en décomposition, déchiquetés par des chiens sur les chaussées ainsi que sur des tas d’immondices. Des étals de marchandes, des voitures, des maisons, des espaces pour affaires, rien n’est en ordre, laissant une image accablante, la ville est désertée.

Des fumées noirâtres montent partout. Des monticules de déchets s’accumulent alors que les services de voirie sont dans l’incapacité de travailler. Suite aux attaques, des hôpitaux avec des patients à l’intérieur sont abandonnés sans médecins. Pas d’électricité. À Port-au-Prince, la vie sombre dans l’enfer des gangs.

Les gangs n’épargnent rien, ni personnes

Des marchés, des business, des écoles, des universités, des églises, des maisons habitables, des voitures entre autres sont vandalisés et même brûlés. Pire encore, le plus grand centre carcéral situé à environ 600 mètres du palais national a été atttaqué depuis le 2 mars, donnant la voie libre à plus de 3000 détenus qui ont pris la poudre d’escampette, parmi eux de dangereux chefs de gangs.

Des espaces considérés comme inviolables autrefois, tels que les églises, les écoles et les hôpitaux ont subi le sort de vandalisme des cruels, des terroristes.

Le Centre-ville fait l’objet d’attaques à répétition où chaque jour un espace est ciblé par les forbans. Même le Palais national est pris pour cible, alors que la Banque de la République d’Haïti (BRH) a été attaquée à maintes reprises. Mais, les malfrats ont été repoussés par les forces de l’ordre. Ces attaques multiples en divers points donnent aux policiers du fil à retordre. Difficile de mener des opérations avec peu d’effectif en divers quartiers. Par-là, 80% de la capitale est contrôlée par les gangs selon un rapport de l’ONU. Port-au-Prince est en syncope.

La capitale des balles perdues

Personne n’est à l’abri. Chaque jour, de fortes détonations sont signalées. Des personnes sont atteintes de balles perdues. Au cœur même du Champ-de-Mars, dans le quartier général des forces armées d’Haïti (FAD’H), un sergent a été atteint d’une balle au cou. Et récemment, un jeune homme dénommé Ronaldinho a rendu l’âme à l’hôpital suite à une balle reçue à Poste Marchand, localité placée à un jet de pierre de la base UDMO et du DDO-PNH.

En tentant de repousser les bandits des lieux importants, les affrontements entre policiers et gangs se soldent souvent par la mort de citoyens innocents. Des tirs d’armes lourdes résonnent comme s’il s’agissait d’une guerre entre deux nations. La terreur est à son comble. La capitale est à éviter.

Exode des habitants, forcé par le chaos

Les habitants sont contraints d’abandonner leurs demeures, la peur au ventre et ne sachant à quel saint se vouer. La capitale se vide presque. Chaque jour, les gens la quittent pour se rendre vers les provinces. Selon un rapport de l’Organisation Internationale de la Migration (OIM), on recense entre le 8 et le 20 mars plus de 33 000 personnes qui ont fui Port-au-Prince pour se rendre majoritairement dans les départements du Grand Sud. La région a déjà reçu plus de 116 000 déplacés. Parmi ces gens qui se sont déplacés, on retrouve ceux qui ont déjà été délogés de leurs quartiers bien avant ces troubles. Des personnes déclarent n’avoir rien pris à part quelques pièces importantes et d’autres n’ont pas pu. Triste situation.

« J’ai couru sous les balles avec mes deux enfants pour quitter ma maison, sans sauver autre chose », se désole Margareth, jeune mère de deux enfants racontant sa situation dans l’après-midi du 29 février, jour du début des chaos au centre-ville. Situation l’obligeant à quitter la rue Romain, non loin du gymnasium pour venir s’installer à Mirebalais chez un proche.

Des territoires perdus du contrôle d’un gouvernement totalement absent, les gangs exécutent leurs propres lois et dirigent en maîtres et seigneurs dans leur fief. Cette situation s’est aggravée depuis le 29 février dernier après le départ du Premier ministre Ariel Henri. Parti en direction du Kenya en vue de finaliser l’accord assurant le déploiement de la mission (MMSS) visant à aider la PNH. Retenu hors du pays, le Dr Henry a annoncé sa volonté de démissionner depuis Porto-Rico. Pourtant, les lignes ne bougent pas encore pour l’amélioration.

Ce chaos, qui était alerté par plus d’un, a fait son horrible apparition. Malheureusement, Port-au-Prince, plus particulièrement le centre-ville est maintenant tombé sous la férule des bandits. Connaissant les déterminations des gangs qui cherchent ardemment à prendre le contrôle du Palais national, quelles sont les perspectives à envisager ?

Wideberlin SENEXANT
Vant Bef Info (VBI)

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