Sans institutions solides, la lutte contre le terrorisme en Haïti risque de faillir, avertit le CARDH

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Le Centre d’analyse et de recherche en droits de l’homme (CARDH) alerte sur les lacunes de l’État haïtien face aux sanctions américaines et à la menace terroriste. Dans son rapport du 7 mai 2025, l’organisation soulève les risques d’une coopération internationale mal orientée et met en évidence l’incapacité de l’État à faire face efficacement aux groupes armés.

Bourdon, 7 mai 2025 – La désignation des gangs Viv Ansanm et Gran Grif comme organisations terroristes par les États-Unis soulève de vives préoccupations sur l’état de la gouvernance en Haïti. Le CARDH souligne que cette décision révèle une vérité inquiétante : l’État haïtien, pour l’instant, est hors-jeu face à la menace des groupes armés.

Un État absent dans la lutte contre le terrorisme

Selon le rapport, ni le gouvernement de transition, ni les institutions judiciaires et policières n’ont les outils nécessaires pour répondre à cette menace. « Dans un régime démocratique, la lutte contre le terrorisme doit être conduite par l’État », rappelle le CARDH, soulignant que la désignation américaine met en lumière l’incapacité de Haïti à gérer cette situation dans le respect de ses lois nationales et des droits fondamentaux.

L’absence d’une législation anti-terroriste haïtienne laisse le pays dépendant des décisions étrangères. Cette situation pourrait marginaliser davantage une justice nationale déjà affaiblie, tout en renforçant l’impunité pour certains acteurs locaux.

La coopération internationale : un soutien nécessaire mais risqué

Le CARDH reconnaît que la coopération internationale est cruciale, mais prévient qu’elle doit respecter la souveraineté d’Haïti et se concentrer sur le renforcement des capacités nationales. L’organisation met en garde contre une instrumentalisation géopolitique de la lutte antiterroriste, où certaines puissances pourraient l’utiliser comme levier diplomatique, voire justifier une ingérence accrue dans les affaires internes du pays.

Un paradoxe : la Mission multinationale d’appui à la sécurité

La Mission multinationale d’appui à la sécurité (MMAS), déployée pour soutenir la Police nationale d’Haïti (PNH), incarne ce paradoxe. Bien qu’elle soit censée aider à reconquérir le territoire, elle agit sans mandat clair et sans stratégie judiciaire coordonnée. Le CARDH plaide pour une approche intégrée, associant dimensions militaires, judiciaires, diplomatiques et sociales pour répondre efficacement à la menace terroriste.

Un vide institutionnel préjudiciable

Le rapport insiste sur le fait que désigner un ennemi ne suffit pas. Il est crucial de le poursuivre dans le respect des normes juridiques. Or, en l’absence de tribunaux fonctionnels, d’un Parlement et d’une Constitution en suspens, Haïti se trouve dans un vide institutionnel qui fragilise toute réponse antiterroriste.

La relance urgente des institutions haïtiennes

Pour le CARDH, la priorité est de relancer les institutions judiciaires et d’engager un débat national sur la création des instruments nécessaires pour juger les crimes terroristes. Sans une réforme en profondeur de l’État haïtien, les sanctions internationales risquent de rester sans effet concret.

Le rapport conclut en appelant à ne pas céder à la tentation d’une répression purement policière ou étrangère. La véritable sortie de crise passe par une reconstruction cohérente de l’État haïtien, soutenue par un appui diplomatique bien encadré et une justice indépendante et forte.

Belly-Dave Bélizaire
Vant Bèf Info (VBI)

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