Sanctions antiterroristes : le CARDH alerte sur une punition collective pour les Haïtiens

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Le Centre d’analyse et de recherche en droits de l’homme (CARDH) met en garde contre les effets des sanctions américaines contre les gangs armés en Haïti. Dans un rapport publié le 6 mai 2025, l’organisation souligne que si la lutte contre l’insécurité est légitime, les moyens utilisés risquent de pénaliser l’ensemble de la population haïtienne.

Bourdon, 6 mai 2025 – En désignant les gangs Viv Ansanm et Gran Grif comme organisations terroristes étrangères, les États-Unis ont franchi un cap. Mais cette décision, loin de se limiter au champ sécuritaire, aurait des répercussions économiques, sociales et humanitaires majeures, selon le CARDH.

Le gel des avoirs, l’interdiction des transactions, et la menace de sanctions pour toute entité soupçonnée de liens directs ou indirects avec ces groupes créent un climat de méfiance. « Cela pourrait provoquer un effet domino sur l’économie haïtienne, déjà fragile », avertit le rapport. Des entreprises locales, parfois injustement associées aux groupes ciblés, pourraient être paralysées.

Un risque d’isolement économique

Le CARDH s’inquiète également d’un isolement financier accru. Haïti, déjà sur la liste grise du Groupe d’action financière (GAFI), risque de basculer sur la liste noire. Cette éventualité couperait le pays des circuits financiers internationaux, entravant les transferts de fonds et les opérations bancaires courantes. « Les mesures anti- terroristes risquent de toucher bien au-delà des criminels : elles fragiliseraient les institutions légales et la population civile », alerte le document.

Des impacts humanitaires déjà visibles

Sur le terrain, les conséquences ne se font pas attendre. Des ONG et agences internationales, soumises à des régulations strictes, commencent à réduire leurs opérations dans les zones jugées à risque. L’USAID impose désormais des restrictions sévères sur l’utilisation de ses fonds. Résultat : dans des quartiers déjà sinistrés, l’accès à l’eau, à la nourriture ou aux soins devient encore plus difficile.

Le CARDH tire la sonnette d’alarme : « La lutte contre le terrorisme ne doit pas devenir un prétexte à la violation des droits humains fondamentaux. »

Un outil à double tranchant

Autre inquiétude : la désignation terroriste pourrait ouvrir la voie à des sanctions individuelles. Si celles-ci visent à briser l’impunité des bailleurs de gangs, elles pourraient aussi être détournées à des fins politiques. Dans un contexte haïtien où les frontières entre acteurs politiques, économiques et criminels sont souvent floues, ce levier pourrait devenir un instrument de règlement de comptes.

Trouver l’équilibre entre sécurité et justice

Le CARDH insiste sur la nécessité de distinguer la justice ciblée d’une punition collective. « Sans garanties pour les innocents, sans mécanismes de recours et sans stratégies de reconstruction, ces sanctions risquent de désagréger le peu de cohésion sociale qui subsiste », conclut le rapport.

Pour sortir durablement de la crise, l’organisation appelle à une approche globale qui allie sécurité, justice, développement et respect des droits fondamentaux.

Belly-Dave Bélizaire
Vant Bèf Info (VBI)

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