Pour une intelligibilité de la politique et sa finalité en Haïti : Histoire, causes et conséquences du politique du Parti Haïtien Tèt kale

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Texte proposé à la rédaction de Vant bèf info (VBI), le 16 février 2019. Il n’engage que son auteur.

L’ex Président de la Républlique, Michel Martelly (photo illustration)

L’instabilité politique est courante en Haïti. Elle est liée même à la nature de la politique. En un mot , la politique est instable. Instabilité comprise comme moment de rupture à l’ordre  du social et du politique et est institué une dynamique de la politique. Ici, le politique est  saisi comme mode de gouvernabilité ou de la gestion de la cité ou de la chose publique. Contrairement à la politique comme remise en question du politique, le politique fait système et tend vers la stabilité. Dans cet article, il est question de saisir l’avenir du politique en Haïti en essayant de questionner l’espace-temps de la politique et/ou du politique après la transition de Février 2016-fevrier 2018 en l’insérant dans la dynamique historique du et /ou de la politique actuel/le et actualisant/e en Haïti. Spécifiquement, mon intention est de saisir  historiquement et politiquement la période  de février 2017-fevrier 2019 en montrant que la transition n’a pas transité de l’instabilité à la permanence. Ce qui me permet de  poser une triple question : d’abord, le mouvement politique ( s’il est bien un mouvement politique) Phtkiste[1]insère-t-il le marché politique comme parti politique moderne ayant le temps de scruter le réel politique haïtien ? Ensuite, en se basant sur la prise du pouvoir comme insertion d’un parti politique au réel politique, le PHTK[2]fait -il figure sur l’échiquier politique en faisant de son programme politique, le sauvetage demandé par le peuple haïtien sachant que le leader PHTKiste ( s’il est un ), Michel Martelly, fait de la critique du système son discours ? Et enfin, quelles sont les causes de l’échec de Jovenel MOISE , le président actuel avec le slogan dit avenir : «  Tè, dlo , solèy ak moun pou met lajan nan pòch ak manje nan vant »[3]ou «  se travay m konn travay, se travay map travay. »[4]et les conséquences de son discours sur l’avenir du peuple haïtien ? Dans ce travail , en premier lieu, je vais tenter, après avoir fait le bilan historique, de montrer que le parti politique PHTK simule la tradition politique et n’intègre pas le pouvoir politique en créant les conditions de sa modernité ; en second lieu, faire ressortir la réalité mensongère du projet ou programme de Jovenel MOISE/ PHTK et pour tirer les conséquences du régime sur l’avenir politique en Haïti après avoir présenté les trois dimensions de l’échec de Jovenel MOISE et de son parti dans la gestion de la chose publique. 

Il faut se rappeler que les élections de 2011 instaurent une nouvelle compréhension des actions des « fondations » et des artistes en Haïti. Cela ne veut pas dire que 2011 est l’année de l’entrée des artistes en politique. Elle représente un moment de la starification du pouvoir en Haïti. Les élections de 2011, après le mandat de René Préval  font surgir deux figures stariques[5]au niveau de la politique avec un niveau de popularité à désirer. Les premières sélections ont jeté le plus populaire aux yeux du pouvoir par un conseil électoral décrié par la population et les partis politiques suivant des critères qui devraient être valables pour les deux candidats mais par destin historique, l’autre n’a pas été écarté suivant  une analyse politique ne prenant pas en compte la sociologie politique électoraliste surtout en pays sous-développés où les gens ne sont pas éduquées. Ceci, pour dire que le pouvoir de l’argent peut tout changer sans se préoccuper de la force du discours. En effet, le discours a fait le jeu. Le vagabond a fait le pont. La morale devient obsolète. Le peuple fait un essai à blanc. 

Leader-artiste fait surface suite à des résultats truqués le plaçant en troisième position avec un écart si négligeable que la population estime une injustice. Après plusieurs séances de manifestations violentes, sous demande des organisations politiques et de l’État un médiateur, Organisations des États Américains (OEA), pour analyser en fonction des paramètres qui leur était propre, donne le leader-artiste deuxième en place du protégé du président René PREVAL, le silencieux Jude CELESTIN. Écarté de la course, Préval semble avoir tout perdu comme empreinte de la politique en question. 

Les analyses de l’enquête de l’OEA, avec toutes ces erreurs statistiques en termes de modèles et de théories, n’ont pas pu de façon intelligente calmer la tension électorale. Pour l’essentiel, le politique s’est reconfiguré en créant de nouveaux acteurs avec un discours contre système. C’est enfin le début du Tèt kale[6]au pouvoir et du régime du mensonge en Haïti en remportant les élections au deuxième tour contre le leader -intellectuel , Mirlande Manigat. Le mensonge non violé fait politique en se dévoilant.

Du régime Tèt Kale  à la transition: Jovenel MOISE président 

Le quinquennat de Martelly MICHEL n’ a pas été facile. L’arrogance du début et la volonté de tout changer ont  reconfiguré l’espace politique en faisant de lui l’homme à domestiquer par la politique et les réseautages du système. En dépit de tout cela, l’argumentaire de sa double nationalité a été si convaincante que même l’étudiant en droit pourrait faciliter sa démission en se référant aux lois de la République. Mais les forces politiques en question, par un deal politique déshonorant et ambitieux contre le peuple, ont pu créer les conditions au respect de l’ordre constitutionnel. Ce qui a boosté le président-artiste à  accomplir son mandant de cinq ans (5) constitutionnellement. 

La réalité politique nationale et internationale, de surcroit,  a favorisé de plein fouet le jeu politique du président-artiste. Il faut noter, en dépit de tout cela, que le combat au parlement n‘a pas été au bon point jusqu’à la constitution d’une majorité avec des idéologies politiques diverses. Mais en Haïti, le parti ne compte pas. Ce qui intéresse le leader politique, c’est le dealpolitique et la possibilité du renouvellement de son mandat soit directement et/ou indirectement. Pour rendre court, au lieu de raconter, certaines scènes ne seront pas mentionnées. L’intérêt de tout, ce sont les élections. Le problème électoral fait surgir la question de l’amendement constitutionnel. Ce dernier a été le premier problème de ce régime. Il était question : Quelle constitution était en vigueur puisqu’elle n’a pas été amendée dans les deux langues ? Ce qui pour certains juristes n’étaient pas le problème et pour d’autres une question fondamentale à résoudre si le gouvernement veut emprunter la voie de la légalité. 

Malgré ce vide de légalité évoqué par certains juristes, l’amendement constitutionnel publié par le régime en place ne peut pas être en sa faveur en considérant qu’il  est sujet et objet de l’amendement. A noter que ces points de droit n’ont pas servi à grand-chose, car l’idée d’un Conseil Électoral Permanent (CEP) prévu par la constitution de 1987 et  amendée, a vu le jour avec incomplétude parce que le parlement n’a pas pu faire choix des trois membres selon les vœux de la constitution amendée. De mobilisations en mobilisations, l’ opposition a remis en question cette posture du président de ne pas courber aux exigences ou doléances de la majorité des partis politiques. Période de crise en période de crise, après plusieurs tentatives, l’Église catholique a facilité la médiation entre les différents partis politiques jusqu’ à la composition d’un nouveau Conseil Électoral provisoire. Cela veut dire de 1987 à nos jours, le dispositif transitoire fait la permanence. 

Ce conseil électoral a fait des élections en dépit des soupçons de certaines composantes de la population qui criaient haut et fort la face partisane du conseil par des décisions absurdes et partisanes en faveur du régime en place. En résumé du processus électoral, on peut comprendre qu’en analysant les discours en place suite à une campagne électorale très mouvementée, que le régime en place a créé toutes les conditions de voir son candidat remporté les élections. En passant, tous les candidats contre le régime s’estiment en bonne position de gagner les élections. Si l’on peut comprendre les élections de 2015, le CEP en question n’a pas commis l’erreur de 2011, c’est-à-dire il a placé en tête le candidat du pouvoir. Ce qui minimise les moyens de n’importe quelle évaluation électorale, si les preuves ne sont pas grandes, à l’écarter de la course électorale. Le jeu politique est complexe et se fait avec stratégies. 

Les dernières mobilisations ont ajourné le deuxième tour de 2015 opposant l’ancien candidat écarté de 2011 au candidat du pouvoir. Analysant la question politique du moment et suivant  la coalition des candidats formant le Groupe 8, le deuxième n’a pas accepté d’y participer et demande au régime en place de faire les évaluations desdites élections afin d’obtenir la vérité des urnes. Cette demande insatisfaite finit par correspondre à l’échéance du mandant présidentiel. Le président a du remettre le flambeau au président du sénat qui devient par la suite président provisoire résultant des élections au deuxième degré et ancien sénateur de la République suivant  les prescrits de la constitution et l’accord des pouvoirs de l’État, c’est -à-dire le pouvoir judiciaire , exécutif et parlementaire. 

La transition fait advenir deux forces opposées avec des objectifs bien spécifiques mais différents. Sans oublier que la tendance de la transition crée le doute que les lavassiens reviennent au pouvoir. En ce sens, les élections allaient être en faveur de l’origine politique du président provisoire. 

La transition  politique par la tendance en question à l’époque  présume un candidat déjà au pouvoir en tenant compte qu’une certaine majorité apparente de ce/cette candidat/e en rapport à l’histoire récente. 

La tension politique suit son chemin et les partis politiques s’affrontent sur le terrain de la mobilisation. Le PHTK hors pouvoir questionne la commission d’évaluation du processus électoral mise sur pieds par le président Provisoire  de la République et les partis d’opposition du renouveau applaudissent la commission et attendent déjà avec des pronostics leur éventuelle qualification pour le deuxième tour des élections avortées de Novembre 2015. Les résultats de l’évaluation confirment en grande partie les soupçons durant le processus électoral mais n’identifient pas les éventuelles fraudes à aucun des candidats et recommandent la reprise des élections. Cette décision politique et consensuelle dans l’intention, mais du point de vue pratique, ne fait pas l’humanité, gangrène le conflit tacite qui va rebondir deux ans plus tard soit au moment dont nous parlons pour des raisons multiples qui devraient faire l’objet d’un autre article. Signalons que les élections ont eu lieu suite à une campagne électorale installant un rapport électoral inégal entre les différents candidats en question.  Ce qu’il faut savoir et comprendre, c’est que la nature a parlé et a créé la brèche, certains partis politiques en ont profitée et d’autres s’en sont laissés accabler. Au final des élections, sans tenir compte des facteurs d’ordre social , politique et environnemental, les partisans ont cru que les fonds dépensés pour la réalisation des élections ont été gaspillés et devraient être servis à financer des projets durables. Ceux qu’ils n’ont pas maitrisé en contexte diffèrent, les résultats pourraient ne pas être les mêmes. A noter que le président provisoire de la République a réalisé contre toute critique en vogue des élections libres, honnêtes et démocratiques avec toutes les limites du contexte électoral. Ces élections ont permis au PHTK de remporter le scrutin  au premier tour. Ce fut la joie du côté des PHTkistes et le lancement des manifestations du côté des opposants. Avec un score large pour un faible de participation, la légitimité est à construire mais en tout la fin est à considérer. Avec Jovenel MOISE comme président de la République, le problème persiste , la transition ne crée pas la permanence. Le 7 février 2019 nous interpelle, le régime subit les conséquences de ses inconséquences. Quelles sont les causes de l’échec  du pouvoir en place et les conséquences de cet échec sur le devenir de la politique et de la population en général?

Causes et conséquences de l’échec du régime PHTKiste au pouvoir 

De Martelly MICHEL à Jovenel MOISE, le mensonge devient norme. De la campagne électorale jusqu’au pouvoir en détention, le mensonge se fait système et crée le rapport inégal  de méfiance entre les différents acteurs politiques en question. Cette tension existant entre les acteurs ont des conséquences sur le pouvoir et sa gestion.À mon sens, les causes de l’échec du PHTK sont  diverses/ multidimensionnelles. Elles émanent de la structure interne du parti en question, de la dynamique politique résultant du mode de traitement de l’opposition et du contexte international. 

Dans un premier temps, l’échec de Jovenel MOISE est intimement lié à l’héritage politique, économique et culturel  du pouvoir Martelly MICHEL qui incarne la corruption comme système de gouvernement instauré par l’imprégnation du pouvoir politique, par les bourgeois et par les élites intellectuelles incapables de se doter d’un  projet politique et qui se construisent contre le peuple. De surcroit, l’histoire des partis politiques nous montrent en grande majorité que les partis politiques fondés durant la gestion d’un pouvoir intègrent le processus de sa destruction car ils n’émanent pas d’un problème politique fondamental mais des projets politiques personnels sans liaison au réel politique. Ce qui détermine en partie l’explosion de la majorité des partis politiques gouvernementaux. En dehors de tous ces éléments, un élément majeur constituant le socle de l’échec du pouvoir en place, est l’absence de programme politique et l’existence d’un discours politique basés sur le mensonge au détriment du droit de dire la vérité. Le projet de plantation de banane reste et demeure le type idéal de mensonge du pouvoir en place pour conserver le pouvoir. Dans le but de voir le pays reproduire ces types de projet, les haïtiens ont rejeté d’un revers de main, la classe politique dite traditionnelle. La traditionnalité de la classe politique doit être débattue et comprise à la lumière des exigences des principes démocratiques.

Dans un deuxième temps, il faut saisir la composante démocratique du pouvoir par le traitement de l’opposition. Le déni de l’opposition est la condition même de sa reconnaissance. Ne pas reconnaitre l’opposition dans la gestion du pouvoir construit sa force et reconfigure son image et le symbolisme de sa pertinence en politique. L’opposition est la condition même du pouvoir. Ce qui n’est pas pris en compte par le pouvoir en place dès son origine, elle est toujours traitée d’opportunistes, d’anarcho-populistes et des qualificatifs repoussant tout accord et tout pacte de gouvernabilité politique. Ce type de construction de la politique fait allier à la pensée bourgeoisie voulant faire du peuple, le dominé par excellence en réclamant la richesse et la tranquillité pour répéter Lyonel TROUILLOT. Par ailleurs, l’arrogance et la suffisance des dirigeants du PHTK trahissent toute médiation politique entre les partis de l’opposition. Mais il faut aussi prendre en compte l’absence d’une vision générale des dirigeants de l’État et d’un groupe conseiller politique et de communicateurs politiques incapables de contextualiser le discours politique en fonction de l’espace-temps du politique.

En dernier lieu, le contexte international, par sa politique d’ingérence transforme  le problème haïtien en substituant la politique de l’État à l’ajustement structurel comme  politique de l’international vis à vis  des  pays dits pauvres. Le rapport Sud /Sud comme alternative en dépit de son faible investissement ne garantit pas en partie le développement du pays même si ces projets sont plus que convaincants en matière d’aide publique au développement. Pour les pays dits riches, c’est l’orientation de l’aide qui cause problème et sa répartition au sein de la population. 

L’échec du pouvoir Tèt Kale, d’abord, engendre un refus du politique au sein de la communauté et un haut niveau d’instabilité dans la pensée de la politique et dans l’orientation générale de la population en matière de développement. Ensuite, il annihile l’effet de tout discours politique des partis politiques sur l’électorat en sachant que depuis 1980-1990, le discours du changement résultant de la chute des Duvalier n‘a pas porté le fruit espéré par la population haïtienne.  A ce titre, l’on pourrait se demander quel type de discours politique peut engager une mobilisation populaire ou une participation au changement social. Enfin, l’échec du pouvoir augmente la rupture interclassique et alourdit la pauvreté, la précarité et la vulnérabilité sociale de la population.

En conclusion, La situation politique est extrêmement instable et très mal configurée en fonction des différents intérêts et projets des différentes classes et /ou des groupes sociaux. En dépit de tout, on doit être unanime à reconnaitre que le problème politique d’actualité en Haïti ne prend pas sa source du pouvoir de Jovenel MOISE,  mais avec lui le mensonge persiste et le peuple se voit négligé par l’État. Les doléances populaires ne sont pas prises en compte. Le seul constat est que le mal persiste. La population est aux abois. Le mensonge fait système. L’amateurisme devient la règle du pouvoir. Ces éléments montrent que la société haïtienne est en présence d’une crise profonde. Cette crise n’est pas seulement d’ordre politique, elle est aussi liée a un problème social dans la mesure où tous les secteurs de la vie nationale sont décriés. En ce sens, les acteurs au pouvoir qui sont étiquetés d’amateurs et de menteurs ne sont pas en mesure d’aider à en sortir. Il faut qu’il y ait une conscience nationale qui s’assoit sur un vrai projet politique non pas sur une petite politique caractérisée par le clan. Il faut aussi un sacrifice de la part des acteurs pour permettre aux institutions de gérer la question de l’État.

Bernadin LARRIEUX

Master II en Philosophie, Paris 8

Ing.Agr, spécialiste du génie rural, FAMV /UEH

Travailleur social licencié, FASCH/UEH 

Normalien Supérieur –philosophe, ENS /UEH

Ing.Agr , spécialiste en génie Rural , Faculté d’Agronomie et de Médecine Vétérinaire de l’Université d’Etat d’Haiti
Travailleur Social licencié
Normalien supérieur -Philosophe Master en philosophie et critique contemporaines de la culture, Université Vicennes Saint Denis, Paris 8.
16, rue charlemagne Nazon 
Tel : (509) 48383994/33689611
email : blarrieux@yahoo.fr/ agrophilo@gmail.com


[1]Les partisans du PHTK, Pati Ayisyen Tét Kale.

[2]Pati Ayisyen Tèt Kale

[3]La terre , l’eau , le soleil et le capital humain pour générer des revenus et valeurs ajoutées.

[4]Je suis un travailleur. Je ne fais que travailler. 

[5]Wyclef Jean et Martelly MICHEL.

[6]Tête rasée.