L’aéroport Toussaint Louverture, 60 ans après – Entre déclin et insécurité

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Il fut un temps où l’aéroport international Toussaint Louverture symbolisait l’ouverture d’Haïti sur le monde. Ancienne base militaire américaine dans les années 1950 et 1960, il fut inauguré le 22 janvier 1965 sous le régime de François Duvalier. Mais 60 ans plus tard, il est devenu quasiment impraticable, victime de la violence des gangs armés qui contrôlent désormais la capitale.

Un aéroport marqué par l’histoire et les crises

Port-au-Prince, 31 janvier 2025 – L’histoire de l’aéroport est jalonnée de transformations. Rebaptisé après la chute des Duvalier et renommé en hommage à Toussaint Louverture en 2003, il a joué un rôle crucial lors du séisme du 12 janvier 2010, en permettant l’acheminement de l’aide humanitaire et l’évacuation de milliers de réfugiés.

Des projets de modernisation ont vu le jour, notamment en 2011, avec un plan visant à doubler sa capacité d’accueil et à renforcer sa résistance aux séismes. Mais ces efforts ont été éclipsés par l’insécurité grandissante, qui a progressivement rendu l’aéroport inaccessible.

Un ciel désormais fermé

La détérioration de la situation sécuritaire a atteint un point critique le 11 novembre 2024, lorsqu’un avion de Spirit Airlines a essuyé des tirs, contraignant le pilote à se dérouter vers la République dominicaine. À la suite de cet incident, JetBlue et Air Caraïbes ont suspendu leurs vols vers Port-au-Prince, laissant des centaines de passagers bloqués à l’étranger.

Cette crise survient après une réouverture en juin 2024, faisant suite à trois mois de fermeture causée par l’offensive des gangs le 4 mars 2024. Malgré les assurances des autorités, la situation s’est rapidement dégradée, transformant l’aéroport en zone de non-droit.

L’Office national de l’Aviation civile (OFNAC) a annoncé la levée de l’interdiction des vols commerciaux à compter du 11 décembre 2024, mais aucun vol commercial n’a encore atterri. En cause, une insécurité persistante aux abords de l’aéroport, poussant la Federal Aviation Administration (FAA) à exiger des mesures de sécurité renforcées avant d’autoriser une reprise des opérations.

Haïti, un pays coupé du monde ?

La paralysie de l’aéroport Toussaint Louverture ne se limite pas à l’arrêt du trafic aérien. Elle illustre l’isolement croissant d’Haïti, où l’État peine à assurer un minimum de stabilité.

Sans accès aérien sûr, l’aide humanitaire devient plus difficile à acheminer, les investisseurs fuient, et les Haïtiens désireux de rentrer ou de quitter le pays se retrouvent coincés. À cela s’ajoute la fermeture de plusieurs axes routiers reliant la capitale aux villes de province, rendant toute circulation dangereuse.

Soixante ans après son inauguration, l’aéroport Toussaint Louverture n’est plus un point d’entrée, mais une piste abandonnée, soumise à la loi des gangs. Jadis symbole d’ouverture, il est aujourd’hui le reflet d’un pays en crise où même le ciel ne semble plus offrir d’échappatoire.

Judelor Louis Charles
Vant Bèf Info (VBI)

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