Insécurité : la Cour de cassation contrainte de fuir le Champ de Mars
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Face à un climat d’insécurité exacerbé au centre-ville de Port-au-Prince, la Cour de cassation a dû quitter son siège historique du Champ de Mars pour se relocaliser à Frères. Cette décision, prise sous la menace constante des gangs armés, reflète l’état de délabrement sécuritaire dans lequel se trouve la capitale haïtienne.
Port-au-prince, samedi 14 décembre 2024
Depuis novembre, les deux chambres de la Cour siègent désormais dans les locaux du Conseil supérieur du pouvoir judiciaire (CSPJ), situés dans une zone sous influence du gang « Kraze Baryè », dirigé par Vitelhomme Innocent. Malgré ce contexte tendu, au moins une séance par semaine a été tenue, avec 67 dossiers traités jusqu’à présent. Un résultat jugé insuffisant au regard des besoins criants de la justice.
L’insécurité dans la zone du Champ de Mars rendait notre travail impossible. Nous n’avions d’autre choix que de nous relocaliser, a expliqué Me Carves Jean commissaire du gouvernement près de la Cour de cassation. Cependant, il reconnaît que la situation à Frères reste préoccupante, bien qu’il espère avancer sur les dossiers d’ici janvier, malgré des incertitudes persistantes.
Une capitale livrée aux gangs
Alors que les autorités ont décrété un état d’urgence sécuritaire, Port-au-Prince continue de sombrer dans le chaos. Des quartiers comme Solino, Nazon et Delmas 24 sont entièrement contrôlés par des bandes armées, paralysant les activités quotidiennes et installant un climat de terreur.
L’abandon du Champ de Mars par la Cour de cassation s’inscrit dans une série de relocalisations forcées d’institutions publiques. Après le Parquet de Port-au-Prince et la Primature, c’est désormais la plus haute instance judiciaire du pays qui cède face à la montée en puissance des gangs. Cette situation met en lumière l’impuissance du Conseil présidentiel de transition (CPT) et du gouvernement d’Alix Didier Fils-Aimé, dont les promesses de restaurer la sécurité peinent à se concrétiser.
Une justice paralysée
Le déménagement de la Cour de cassation combiné à celui d’autres tribunaux perturbe gravement le fonctionnement de la justice en Haïti. Déjà critiquée pour sa lenteur celle-ci voit ses activités réduites à leur strict minimum, compromettant davantage l’accès des citoyens à un système judiciaire fonctionnel.
Cette situation, reflet d’une crise sécuritaire et institutionnelle sans précédent, illustre l’ampleur des défis auxquels Haïti fait face. En l’absence de mesures concrètes pour rétablir l’ordre, la confiance des citoyens dans les institutions publiques ne cesse de s’éroder, aggravant encore un peu plus la crise multidimensionnelle qui secoue le pays.
Par Lanois Camilus Alcidor