Haïti sombre dans le chaos, la criminologie peut-elle l’aider à s’en sortir?
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Depuis plus de trois ans, Haïti vit une situation chaotique avec des gangs qui contrôlent des pans importants des deux plus grands départements géographiques en termes de superficie et de nombre d’habitants : l’Ouest et l’Artibonite. Plus d’un dénonce l’absence de volonté des dirigeants à prendre des mesures pour résoudre le problème de la criminalité. D’autres affirment qu’une approche scientifique se révèle plus que nécessaire et milite pour une mise à profit de la criminalité dans cette perspective.
Port-au-Prince, le 29 décembre 2024. Le président de la Société Haïtienne de Criminologie et d’Études Pénales (SOHACEP), le docteur Luckner Edouard déplore la montée en puissance des gangs armés qui poussent les autorités à fuir leurs lieux de travail.
C’est notamment le cas du palais de justice, de la Primature, du parlement et du palais national, entre autres. Il dénonce ce qu’il appelle la fragilisation de l’Etat qui, dit-il, prend ses racines à la fois dans l’inefficacité des élites haïtiennes à assumer leurs responsabilités, dans les inégalités sociales persistantes, dans l’expansion des réseaux internationaux de trafic d’armes et de stupéfiants et dans l’absence de services publics dans les zones défavorisées.
Les citoyens, livrés à eux-mêmes, tentent certaines fois de se faire justice en utilisant entre autres, le phénomène du “Bwa Kalé”.
Cependant, il dit croire que la mise à profit de la criminologie peut aider à apporter une réponse intégrée au problème, soulignant que la lutte contre la criminalité nécessite une approche globale et systémique.
D’abord, avance-t-il, il faut comprendre les causes profondes de la criminalité, faisant remarquer que la criminologie examine, en ce sens, des facteurs multiples dont le profil des délinquants (c’est l’aspect psychologiques) ; l’exclusion économique, la corruption et la marginalisation (C’est l’aspect social) et l’absence d’un cadre étatique fort (c’est l’aspect politique).
Donc, soutient-il, cette analyse approfondie permet de développer des stratégies ciblées pour prévenir la criminalité, en élaborant des politiques de prévention efficaces.
Il souligne aussi que les études criminologiques sont de nature à orienter la conception de programmes visant à réduire les inégalités, à réhabiliter les délinquants et à renforcer les mesures de sécurité communautaire.
Par ailleurs, le docteur Edouard croit qu’il est nécessaire d’optimiser les capacités des forces de l’ordre, ajoutant que les outils fournis par la criminologie dont l’analyse médico-légale et le profilage criminel, peuvent grandement améliorer les enquêtes et la prévention des crimes.
Il propose aussi de promouvoir la justice et les droits humains avec la mise en place d’un système judiciaire juste et transparent. Il est également nécessaire, dit-il, d’utiliser des procédures équitables, de protéger les victimes et les accusés et de réduire les discriminations dans l’application des lois.
Enfin, le président de la SOHACEP juge nécessaire de mettre l’accent sur le rôle clé de la sensibilisation des communautés notamment par l’éducation des citoyens sur la prévention et leurs droits.
Il se dit convaincu que la criminologie peut offrir des réponses concrètes pour réduire la criminalité en Haïti. Mais, est-il en train de prêcher dans le désert ? Ses propositions tomberont-elles dans les oreilles des sourds ?
Dodeley Orélus
Vant Bèf Info (VBI)