Haïti – Sécurité : Martissant, quatre ans d’offensive armée et de repli de l’État, selon le CARDH

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Quatre ans après l’offensive meurtrière des gangs à Martissant, le Centre d’analyse et de recherche en droits de l’homme (CARDH) publie un rapport accablant sur l’expansion territoriale des groupes armés en Haïti. Le document, rendu public le 1er juin, décrit une stratégie de conquête méthodique ayant permis aux gangs de prendre le contrôle de larges portions du territoire national, au détriment de l’État.

Port-au-Prince, le 2 juin 2025 – Tout a basculé le 1er juin 2021, lorsque les gangs de Gran-Ravin et de Village-de-Dieu ont lancé une attaque coordonnée contre leurs rivaux de Ti Bwa, dans la zone de Martissant. Les affrontements, particulièrement violents, se sont propagés de Martissant 2A à Martissant 23, en passant par Pont Bréyard. Rapidement submergée, la Police nationale d’Haïti (PNH) a dû abandonner le sous-commissariat local. En quelques jours, la zone est tombée sous le contrôle total des groupes armés.
Le 20 mars 2023, l’État haïtien a officiellement reconnu Martissant comme un territoire perdu, un terme qui désigne des zones totalement soustraites à l’autorité publique et sous domination criminelle. Le rapport du CARDH recense 28 territoires perdus, dont 25 dans le département de l’Ouest, incluant plusieurs quartiers du centre-ville de Port-au-Prince.
Cette perte de contrôle ne s’est pas faite au hasard. Le CARDH met en lumière une stratégie structurée d’occupation : dans chaque zone conquise, des chefs de gang sont désignés comme autorités de fait. Ils imposent des taxes, régulent les transports, tranchent des litiges, et pratiquent des formes brutales de répression. Ils organisent également l’interception de camions de marchandises et des rapts ciblés pour financer leurs opérations.
Pour le CARDH, Martissant constitue un précédent devenu modèle. Loin d’être un cas isolé, l’épisode marque le début d’une politique de conquête territoriale, menée de manière méthodique. Ce processus, toujours en cours, traduit l’effondrement de la capacité de l’État à protéger son territoire et sa population.
Belly-Dave Bélizaire
Vant Bèf Info (VBI)