Haïti : Port-au-Prince, une capitale hors service, symbole de l’effondrement de l’État

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Longtemps considérée comme le cœur politique, économique et social d’Haïti, Port-au-Prince n’est aujourd’hui que l’ombre d’elle-même. Désormais livrée aux gangs armés et abandonnée par les institutions, la capitale haïtienne est devenue le théâtre d’un chaos sans précédent, emblème tragique de la faillite de l’État.

Port-au-Prince, le 22 avril 2025 –

Une ville sous le joug des gangs

Le contrôle du pouvoir central s’est effondré. De Mariani à Martissant, de La Saline à Croix-des-Bouquets, les groupes armés imposent leur autorité sur des pans entiers de la capitale. L’État a perdu toute capacité d’action, remplacé par une gouvernance illégitime dictée par la violence.

Les axes stratégiques sont devenus zones de guerre. La route de Martissant est impraticable, la Route Nationale #1 n’est plus sûre. La capitale est quasi-isolée, coupée du reste du pays.

L’État en déshérence

Le vide institutionnel est total : pas de président élu, Parlement dysfonctionnel, gouvernement de transition affaibli. Dans ce contexte, les services publics se désagrègent. Commissariats fermés ou détruits, tribunaux désertés, prisons attaquées : la justice est en panne.

L’éducation subit elle aussi de plein fouet cette instabilité. Des milliers d’écoles ont fermé, les universités sont à l’arrêt, et de nombreux enseignants ont fui l’insécurité. Le droit à l’éducation n’est plus garanti.

Économie informelle sous emprise

Dans cette économie en ruine, les marchés informels sont sous pression constante. Les gangs imposent des « raket » aux commerçants, devenus otages d’un système d’extorsion. Même le port peine à fonctionner, poussant les importateurs vers d’autres infrastructures, comme Saint-Louis du Sud.

La précarité s’impose dans les quartiers populaires, où l’autonomie des populations remplace l’absence de l’État. Le chômage atteint des sommets, alimentant le recrutement par les bandes armées.

Une urgence humanitaire ignorée

Port-au-Prince compte de nombreux sites de fortune, accueillant des milliers de déplacés internes fuyant les violences. À l’échelle nationale, plus de 360 000 personnes sont concernées. Dans la capitale, écoles, lycées et institutions publiques sont transformés en camps de fortune.

Sans accès à l’eau, à la nourriture ou aux soins, ces familles survivent dans l’indifférence d’un pouvoir impuissant et d’une communauté internationale encore trop timide. Un récent rapport de l’Office de la Protection du Citoyen a recensé 16 sites de déplacés dans la zone métropolitaine.

Derniers remparts d’une société en souffrance

Malgré ce contexte apocalyptique, une forme de résilience s’organise. Églises, associations communautaires et citoyens engagés maintiennent, tant bien que mal, le tissu social debout. Une solidarité discrète, mais essentielle, face à une décomposition programmée.

Aujourd’hui, Port-au-Prince n’est plus une capitale. C’est un territoire abandonné, où règne la peur et où seule la loi du plus fort prévaut.

Belly-Dave Bélizaire

Vant Bèf Info (VBI)

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