Haïti – Politique : Le CPT, espoir brisé d’une transition

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Un an, jour pour jour après son installation, le Conseil présidentiel de Transition (CPT) est rattrapé par la rue. Ce qui devait incarner une nouvelle ère politique semble désormais nourrir le même rejet que les régimes précédents. Entre décisions unilatérales, opacité, luttes internes et promesses non tenues, la grogne populaire enfle, nourrie par un sentiment d’abandon profond.

Port-au-Prince, 7 avril 2025 – Delmas 39, . Nadège, une commerçante au regard fatigué, étale ses marchandises, tout en lançant : « On pensait qu’ils allaient faire mieux que les autres. Mais on voit que c’est la même stratégie : ils mettent les leurs au pouvoir, sans écouter personne. » À quelques pas de là, Jean Wisley Dérilus, enseignant au Collège Ernst Jeudi, acquiesce. « Ils ne représentent pas le peuple. Toutes leurs décisions se prennent entre politiciens. Aucun espace n’est laissé aux citoyens. »

Promesses brisées, sécurité en ruine

Le CPT avait promis un apaisement rapide du climat sécuritaire. Pourtant, les balles continuent de pleuvoir à Carrefour-Feuilles, Solino, Kenscoff… Les gangs étendent leur territoire, la peur gagne du terrain, et les cadavres s’empilent. Au sein de l’Office de la Protection du Citoyen (OPC), un père de famille raconte : « J’ai fui Bel-Air, puis Delmas 30. Ils disaient qu’ils avaient une solution. Résultat ? Nous vivons cachés, sans savoir ce que demain nous réserve. » Dans un coin sombre du même centre, une femme, tête baissée, murmure : « Les bandits dictent leur loi. Et eux, là-haut, gardent le silence. »

Des pratiques anciennes sous un costume neuf

Présenté comme un rempart contre la corruption, le CPT est aujourd’hui éclaboussé par des accusations de malversations. Trois de ses membres seraient mêlés à la manipulation de fonds publics via la Banque Nationale de Crédit. Faute de tribunal apte à les juger, les dossiers stagnent, mais le soupçon s’enracine. « Ils dénoncent la corruption mais font pire dans l’ombre », lâche un étudiant en droit. « C’est un éternel recommencement. » Roselaine Exumé, fonctionnaire retraitée, n’est pas surprise : « J’ai vu ce film toute ma vie dans l’administration publique. »

Chaos au sommet, paralysie en bas

Dans les coulisses du Conseil, la discorde fait rage. Conflits de leadership, décisions bloquées, décrets jamais publiés… Cette cacophonie interne renforce l’idée d’un organe incapable de gouverner. « Ils passent leur temps à se chamailler », grogne Maxo, chauffeur de tap tap. « Pendant ce temps, le pays coule. » Une autre citoyenne, qui préfère rester anonyme, enfonce le clou : « On dirait qu’ils sont là pour maintenir le chaos, pas pour le résoudre. »

La date du 3 avril 2025, censée marquer un premier bilan, s’est éteinte dans l’indifférence. Aucun rapport, aucune évaluation. Le silence du CPT face aux attentes du peuple devient assourdissant. Et dans les rues comme sur les réseaux, la colère s’organise. Si rien ne change, la transition promise pourrait bien devenir, elle aussi, un nouveau chapitre d’échec.

Belly-Dave Bélizaire
Vant Bèf Info (VBI)

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