Haïti : l’Avant-projet de Constitution 2025 brise le plafond d’âge pour les jeunes

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L’Avant-projet de Constitution 2025 ouvre la voie à une participation accrue des jeunes à la vie publique. En abaissant les seuils d’âge pour les fonctions électives et en institutionnalisant leur rôle dans les prises de décision nationales, ce texte rompt avec l’esprit conservateur de la Constitution de 1987.

Port-au-Prince, 16 juin 2025 – Le politologue Roudy Stanley Penn a animé, le 7 juin dernier, une conférence devant plus de 300 jeunes, autour de la place accordée à la jeunesse dans le nouvel avant-projet de Constitution.
Selon lui, cette réforme amorce un tournant historique. « Le texte reconnaît enfin le rôle central des jeunes dans la reconstruction du pays », affirme-t-il.
Dès le préambule, l’avant-projet affirme sa volonté d’« assurer la participation effective des jeunes dans les prises de décisions engageant l’avenir de la Nation ». Contrairement à la Constitution de 1987, qui n’évoquait la jeunesse que de manière marginale, cette nouvelle mouture la place au cœur de l’architecture institutionnelle.
Une nouvelle génération attendue au pouvoir
Avec près de 70 % de la population âgée de moins de 30 ans, l’Avant-projet reflète cette réalité démographique à travers des mesures concrètes. Il propose d’abaisser les âges requis pour accéder à plusieurs postes clés :
Présidence : de 35 à 30 ans
Premier ministre et ministres : de 30 à 25 ans
Sénat : de 30 à 25 ans
Députation : de 25 à 21 ans
Mairie : de 25 à 21 ans
Conseils électoral et constitutionnel : de 40 à 30 ans
Pour Roudy Stanley Penn, ancien ambassadeur d’Haïti à Taïwan, ces propositions visent à intégrer pleinement les jeunes dans la gouvernance. Militant de longue date pour une réforme des critères d’éligibilité, il rappelle que « l’âge ne doit plus être un frein à la compétence ni à l’engagement ».
Des mesures encore jugées insuffisantes
Malgré ces avancées, certaines dispositions restent perçues comme trop timides. Les articles 72 et 76.1 se limitent à « encourager la candidature des jeunes et des femmes », sans prévoir de mécanismes concrets.
Roudy Stanley Penn critique cette formulation qu’il juge trop vague. Il plaide pour des obligations claires, notamment l’instauration de quotas : 10 % de jeunes de moins de 30 ans et 30 % de femmes sur les listes électorales. Il préconise également que la loi électorale rende ces quotas contraignants, sous peine d’invalidation des candidatures.
Selon lui, sans mesures fortes, les jeunes risquent de rester exclus des sphères de pouvoir ou réduits à de simples figurants.
Reconstruire un pacte intergénérationnel
Certaines voix émettent des doutes sur la maturité politique des jeunes, les accusant de privilégier le divertissement à l’engagement civique. Roudy Stanley Penn reconnaît ces critiques, mais les juge mal fondées.
« Les jeunes ne sont pas les principaux responsables des dérives sociales. Ce sont les failles du système qui produisent ces comportements. Et ce sont souvent eux qui en paient le prix », soutient-il.
Il insiste : abaisser l’âge d’éligibilité ne signifie pas confier automatiquement le pouvoir aux jeunes, mais leur ouvrir l’accès à la compétition électorale. « Le peuple, à travers les urnes, reste souverain dans ses choix », rappelle-t-il.
L’avenir d’Haïti repose sur une jeunesse engagée, formée et écoutée. Reconnaître ce potentiel exige des choix politiques audacieux et inclusifs. En brisant les plafonds d’âge, l’Avant-projet de Constitution 2025 ouvre une brèche significative. Reste à savoir si les acteurs politiques sauront la transformer en véritable révolution démocratique… portée par les jeunes eux-mêmes.
Jean Allens Macajoux
Vant Bèf Info (VBI)