Haïti / Crise : l’ONU convoque une réunion du Conseil de sécurité en janvier 2025
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Le Conseil de sécurité des Nations Unies tiendra ce mois-ci son briefing trimestriel sur la situation en Haïti. María Isabel Salvador, Représentante spéciale et Cheffe du Bureau intégré des Nations Unies en Haïti (BINUH), y présentera les derniers développements politiques, sécuritaires et humanitaires, ainsi que le rapport du Secrétaire général sur les activités de la mission.
New York, jeudi 2 janvier 2025
Cette réunion intervient alors qu’Haïti traverse une crise sans précédent, marquée par une explosion de la violence des gangs armés. Ces violences engendrent une catastrophe humanitaire de grande ampleur, avec des milliers de déplacés confrontés à des conditions de vie extrêmement précaires.
Depuis l’assassinat du président Jovenel Moïse en juillet 2021, la situation sécuritaire et politique s’est aggravée. Selon l’ONU, environ 85 % de la capitale, Port-au-Prince, est sous le contrôle de gangs criminels, qui recourent à des enlèvements des violences sexuelles et des meurtres pour asseoir leur domination. Ces exactions ont provoqué des déplacements massifs et une insécurité alimentaire aiguë, exacerbant une crise de gouvernance marquée par l’absence d’élections depuis 2016.
Une tentative de transition politique en péril
Pour remédier à cette crise, la Communauté des Caraïbes (CARICOM) a facilité un accord politique en février 2024. Cet accord a conduit à la formation d’un Conseil présidentiel de transition (CPT) en avril 2024. Ce dernier a pour mission de désigner un Premier ministre intérimaire, de former un Conseil électoral provisoire et un Conseil national de sécurité, et de collaborer avec la communauté internationale pour accélérer le déploiement de la Mission de soutien à la sécurité multinationale (MSS) dirigée par le Kenya.
Cependant, les avancées sont limitées. Malgré la nomination de Garry Conille comme Premier ministre intérimaire en 2024, des désaccords internes ont bloqué la formation complète du Conseil électoral. Pire, un scandale de corruption impliquant des membres du CPT a fragilisé sa légitimité. En novembre 2024, Garry Conille a été limogé et remplacé par Alix Didier Fils-Aimé, un homme d’affaires controversé.
Un climat sécuritaire et humanitaire alarmant
Sur le terrain, la violence continue de s’intensifier. En décembre 2024, un massacre à Cité Soleil a fait plus de 180 morts, portant à plus de 5 000 le nombre de victimes liées aux gangs pour l’année, selon l’ONU. En parallèle, des infrastructures critiques, comme l’aéroport international de Port-au-Prince, ont été prises pour cible par les gangs.
Cette insécurité aggrave une crise humanitaire déjà catastrophique. Plus de 700 000 personnes sont déplacées, et près de la moitié de la population fait face à une insécurité alimentaire aiguë. Les inondations de fin 2024 ont encore accentué les souffrances des populations vulnérables.
Un soutien international insuffisant
Le déploiement de la MSS, avec seulement 400 policiers sur les 2 500 prévus, demeure largement insuffisant pour contenir la violence. Malgré un renouvellement de son autorisation en septembre 2024 par la résolution 2751, les ressources financières et humaines restent limitées.
Le Conseil de sécurité débat actuellement de la possibilité de transformer la MSS en une mission de maintien de la paix financée par le budget régulier de l’ONU. Cependant, cette proposition divise les membres permanents, la Chine et la Russie s’y opposant fermement.
Perspectives incertaines
Alors que l’ONU appelle à des actions concrètes pour renforcer la police nationale haïtienne et organiser des élections d’ici février 2026, le trafic d’armes et les divisions internes demeurent des obstacles majeurs.
Dans ce contexte, la réunion du Conseil de sécurité ce mois de janvier sera cruciale pour définir les prochaines étapes et tenter de stabiliser un pays plongé dans une crise multidimensionnelle.
Jean Gilles Désinord
Vant Bèf Info (VBI)