Avancée des gangs sur la RN2 : les habitants de Léogâne ne dorment que d’un œil

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Léogâne, le 16 juillet 2024 – Alors que la violence gangrenant le pays s’intensifie, les habitants de Léogâne vivent dans l’angoisse de voir les gangs s’emparer de leur commune. Après que les factions de la coalition « Viv Ansanm » ont déjà pris le contrôle de Gressier, la proximité de cette menace ne fait qu’accroître l’inquiétude parmi les Léogânais.

Une faction des gangs de la coalition « Viv Ansanm », dirigée par le redoutable caïd « Bout ba », a envahi Mariani en novembre 2023. En mai 2024, une autre faction, régentée par « Ti bebe », a assiégé la commune de Gressier. À deux reprises, ils ont attaqué le commissariat de la ville, tué des habitants, pillé et brûlé des maisons. Ces attaques armées, survenues en mai et juin, ont profondément ébranlé la région. La police a repris le contrôle du commissariat deux fois, mais n’a pas réussi à éliminer les gangs. « Ces derniers consolident leur position et prennent davantage de territoire », a déclaré Jean Vladimir Bertrand, agent exécutif intérimaire de Gressier. Selon M. Bertrand, les moyens déployés par la police étaient insuffisants pour contrer la menace grandissante des malfrats.

La presse haïtienne a rapporté que l’escalade de la violence a poussé près de 23 000 habitants à fuir leurs foyers, cherchant refuge dans les localités de Colline et Brache, dans la ville de Léogâne. Avec la présence de ces criminels à seulement 12,3 kilomètres de Léogâne, les habitants de la cité d’Anacaona vivent dans la peur au quotidien. Léogâne, qui a accueilli les familles ayant fui Gressier, craint à son tour d’être attaquée. Les échos des violences perpétrées à Gressier résonnent à Léogâne, où des familles ne savent pas sur quel pied danser.

« Nous avons entendu parler de l’installation de gangs à proximité, et cela nous terrifie », confie une mère de famille. Les rumeurs circulent rapidement, alimentant un climat de méfiance et d’anxiété. Une enseignante de langues étrangères, souhaitant garder l’anonymat, a exprimé son effroi lorsqu’elle a appris que des gangs menaçaient de s’installer dans son quartier, près de Carrefour Colas. « Tu n’aurais pas le numéro du CG Muscadin ? », a-t-elle demandé à un journaliste de notre rédaction. « Pourquoi tu me demandes son numéro ? Que t’est-il arrivé ? », lui a demandé le journaliste. Elle a répondu : « Des gangs ont averti les résidents de mon quartier de l’installation de l’un des leurs. Je ne sais pas quoi faire. Je n’ai nulle part où aller. Je suis Léoganaise. Ici, c’est la maison de mon père. Je ne me vois pas habiter ni chez un proche ni chez un ami », a-t-elle déclaré, visiblement triste.

Cette enseignante a toutes les raisons d’avoir peur que sa ville ne tombe aux mains des gangs. En effet, « Bayotan », un présumé bandit identifié comme un membre du gang de « Gran Ravin », qui s’apprêtait à créer son propre gang à Habitat, a été abattu par la Police nationale d’Haïti, le mardi 9 juillet dernier. Avant l’élimination de Bayotan, les gangs visitaient de temps en temps la ville et commettaient des vols la nuit. Ils ont attaqué des plages et ont même réussi un jour à atteindre la place publique de Léogâne.

La peur des Léogânais grandit à chaque rumeur, alimentée par des récits de violence imminente et des témoignages effrayants. Chaque nouvelle information sur une attaque potentielle ou l’arrivée de gangs dans les environs plonge les habitants dans une angoisse profonde. Les discussions dans les marchés, les murmures au coin des rues et les messages échangés sur les réseaux sociaux amplifient l’angoisse collective. Chaque bruit de pas suspect la nuit, chaque voiture inconnue garée dans un quartier résidentiel, chaque inconnu que les gens croisent sur leur chemin renforce le sentiment d’insécurité omniprésent.

Léogâne, historiquement une ville de refuge, se transforme peu à peu en un lieu de panique avec les gangs opérant à seulement quelques kilomètres.

Miché de Payen
Vant Bèf Info (VBI)