Violence des gangs : l’ « Haïtien », exilé sur sa propre terre

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Par Wandy CHARLES

Haïti n’est plus ce pays il faisait bon vivre. Ce territoire où chaque citoyen pouvait se sentir chez lui, maître de ses pas et de son avenir. Désormais, l’ « Haïtien » devient un nomade sur sa propre terre, poussé à fuir une violence omniprésente et aveugle. La réalité d’aujourd’hui est lugubre: des gangs armés, qui sèment la terreur dans des quartiers et communes, jadis paisibles. Ce qui contraint familles, enfants, vieillards et personnes handicapées à quitter leurs demeures sans savoir où aller. Ils abandonnent non seulement leurs maisons, mais aussi leurs racines, leurs souvenirs.

Des régions entières comme le Bas Delmas, Tabarre, Solino, Carrefour-Feuille, Pont-Sondé et Arcahaie se vident de leurs habitants, dévastées par cette violence acharnée et insoutenable des gangs. Des citoyens paisibles se voient chassés de leur foyer, errant, sans abri ni espoir de retour immédiat. C’est une réalité douloureuse sur les plans physiques et psychologiques.

Mais cette errance ne s’arrête pas malheureusement aux frontières d’Haïti. En quête d’un refuge plus sûr, certains se tournent vers la République Dominicaine, leur voisin le plus proche. Hélas, ils y sont accueillis par une autre forme de violence : celle des expulsions massives et systématiques. Chaque semaine, les autorités dominicaines menacennt de refouler 10 000 ressortissants haïtiens, souvent dans des conditions inhumaines. Nombreux sont ceux qui, dans des témoignages accablants, dénoncent des traitements humiliants, traqués comme des bêtes sauvages avant d’être renvoyés dans leur pays d’origine. Le droit à la dignité humaine est piétiné, comme si la misère de leur sort les privait de toute considération.

À des milliers de kilomètres, des Haïtiens attendent leur sort en Turquie, bloqués, espérant un retour qui semble incertain. Et ailleurs encore, dans ces contrées perçues comme des « eldorados », des pays plus prospères expulsent aussi nos frères et sœurs arrivés clandestinement, alimentant le cycle infernal de l’exode et de l’exclusion.

Le constat est tragique : sur son propre sol, l’ « Haïtien » est abandonné, délaissé par des dirigeants incapables d’assurer sa sécurité et son bien-être. Quand il n’est pas victime de l’indifférence de l’État, il est pourchassé et terrorisé par ses propres frères, membres de gangs qui, pour leur profit, ont choisi la voie criminelle. La spirale de la violence ne fait aucune distinction de statut social, de genre ou d’âge, et frappe les plus vulnérables sans relâche. Que reste-t-il de la souveraineté nationale quand un peuple ne peut plus vivre en sécurité sur son propre territoire, et qu’il est rejeté ailleurs ?

L’Haïti d’aujourd’hui est une nation en exil intérieur, et son peuple, un peuple en migration forcée. La communauté internationale, tout comme les autorités haïtiennes, ne peut plus détourner les yeux devant cette tragédie silencieuse. Ce drame ne concerne pas seulement les victimes immédiates, mais interroge le monde entier sur le respect des droits humains les plus élémentaires.

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