Survivre et informer : le défi permanent des journalistes en Haïti

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Les journalistes haïtiens font face à une multitude d’obstacles dans l’exercice de leur profession. Ces défis vont au-delà de ceux généralement rencontrés dans d’autres parties du monde. En dépit de ces difficultés, ils sont souvent tenus à une exigence de performance élevée, ce qui rend leur travail encore plus complexe.

Port-au-Prince, le 24 septembre 2024.- En effet, en Haïti le journalisme est pratiqué dans un contexte socio-économique et politique extrêmement instable et précaire.

Les journalistes doivent constamment composer avec des menaces directes quant à leur sécurité. Les gangs armés qui contrôlent certaines parties du pays, en particulier dans la capitale, représentent un danger réel et omniprésent. Les journalistes qui enquêtent sur des sujets sensibles, tels que la corruption, la violence ou les luttes de pouvoir, peuvent devenir des cibles. Ce climat de peur affecte directement leur liberté de parole et d’investigation.

« Enquêter seulement sur un dossier peut être fatal, voire persister jusqu’au bout » a déclaré le journaliste Wilkens Saint-Louis.

En plus des menaces physiques, il existe une pression financière. Les médias haïtiens, sont mal financés. Ils ne peuvent pas toujours payer leurs journalistes à un niveau compétitif. Ce qui pousse certains d’entre eux à pratiquer le journalisme, tout en ayant d’autres sources de revenus. Le manque de ressources influence aussi la qualité du travail, car les journalistes n’ont pas toujours accès aux outils ou aux formations nécessaires pour se maintenir au niveau des standards.

Pression pour la performance

Malgré ces conditions extrêmement difficiles, les attentes en termes de performance sont élevées. Les journalistes doivent produire des textes de qualité dans un environnement marqué par la précarité. Ils doivent trouver des moyens innovants pour recueillir des informations, en contournant les obstacles techniques et sécuritaires. Cette résilience est essentielle pour maintenir la qualité de l’information.

De plus, le rôle du journaliste en Haïti dépasse souvent celui d’un simple rapporteur de faits. Dans un contexte où l’accès à une information fiable est limité, les journalistes haïtiens jouent souvent un rôle d’éducateurs publics. Ils ont la responsabilité de démystifier les enjeux complexes du pays et de fournir à la population une compréhension claire des événements qui affectent leur quotidien.

Censure et autocensure

La censure, qu’elle soit gouvernementale ou liée à des groupes armés, est une autre contrainte majeure. En raison des menaces de violence ou de répercussions économiques, de nombreux journalistes pratiquent une forme d’autocensure pour éviter des représailles. Cette autocensure limite la capacité des journalistes à exposer des vérités cruciales.

« Parfois je laisse tomber un dossier qui s’avère être dangereux. Quelques fois, je me lance mais incognito, surtout les dossiers dénonçant les actions des gangs armés », confie un journaliste qui souhaite garder l’anonymat.

Une menace constante sur le terrain

La montée en puissance des gangs armés dans plusieurs zones du pays complique sérieusement le travail des journalistes. Les reporters, en particulier ceux chargés de couvrir l’actualité politique et sociale, se trouvent dans des situations de danger permanent. Les zones rouges, contrôlées par ces groupes armés privent la population d’une couverture médiatique essentielle.

« Il y a des endroits que je ne peux, en aucun cas, fréquenter. Hormis le fait que personne ne veut parler, je suis mal vu comme journaliste » témoigne un journaliste reporter de Portrait Magazine.

Malgré les appels répétés, les initiatives gouvernementales restent insuffisantes. Le manque de moyens et de volonté politique empêche la mise en place d’un cadre sécuritaire efficace pour les médias.

Dans ce contexte d’insécurité croissante, les journalistes haïtiens continuent de se battre pour remplir leur mission d’informer, malgré les risques. Il est crucial que les autorités haïtiennes mettent en place des mécanismes efficaces pour protéger les travailleurs de la presse. Sinon, c’est non seulement la liberté de la presse qui sera compromise, mais aussi l’avenir même de la société haïtienne.

Belly-Dave Bélizaire
Vant Bèf Info (VBI)

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