Entre « corridor commercial » et « réouverture partielle », Abinader ne sait plus quel thème utiliser
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Une véritable patate chaude entre les mains du président dominicain Luis Abinader. Après avoir ordonné de manière « inamicale » et « inopportune » la fermeture de la frontière par les voies maritime, terrestre et aérienne, alors que les deux pays étaient en pleine discussions, le dirigeant dominicain ne sait comment satisfaire les commerçants de son pays et ne pas perdre la face.
Port-au-Prince, le 10 octobre 2023. En ordonnant, le 13 septembre dernier, la fermeture de la frontière (effective deux jours plus tard), le président dominicain croyait pouvoir contraindre les haïtiens à abandonner les travaux de construction d’un canal sur la rivière Massacre, le premier construit sur le territoire haïtien alors que les dominicains ont déjà 11 prises sur cette même rivière.
Il affirmait haut et fort et criait sur tous les toits que le dialogue reprendrait uniquement si les haïtiens abandonnaient les travaux.
Mais entretemps, de l’eau a coulé sous le pont et Abinader s’est heurté aux vives critiques des commerçants dominicains, privés à cause de la fermeture de la frontière, du juteux marché haïtien.
Des mouvements de protestations ont été organisés du côté dominicain de la frontière. En effet, le lundi 2 octobre dernier, des petits et moyens producteurs d’œufs des provinces de La Vega et d’Espaillat, ont organisé une manifestation contre le blocus des exportations vers Haïti.
Ils ont jeté des œufs pourris devant le Monument à l’Agriculteur de Moca. Manuel Escañole, le président de l’Association nationale des producteurs d’œufs (ASOHUEVOS), annonçait le lendemain que « Si la frontière avec Haïti reste fermée de manière indéfinie, nous serons obligés d’abattre 3 millions de poules afin d’équilibrer l’offre et la demande d’œufs ».
Abinader s’est donc vu contraint d’agir pour sauver ce secteur et, évidemment, c’est vers la frontière qu’il s’est tourné.
Il a donc multiplié les annonces selon lesquelles il comptait atténuer les mesures à la frontière jusqu’à annoncer, hier lundi, une réouverture partielle mais uniquement pour le commerce pas pour la migration.
Le gouvernement haïtien n’a pas mis de temps à réagir.
A travers le ministère de la communication, il a réaffirmé le droit inaliénable des haïtiens d’utiliser de façon équitable les ressources hydriques binationales.
Haïti a surtout souligné que : « Le Gouvernement de la République d’Haïti croit qu’un dénouement ne sera considéré comme convenable, que si elle permet le partage équitable des ressources hydriques, la normalisation des relations entre les deux pays et de revenir à la circulation des personnes et des biens des deux côtés, comme c’était le cas entre les deux Républiques avant la fermeture unilatérale du 15 septembre ».
En fin de journée (Lundi), Abinader ne parlait déjà plus de réouverture partielle de la frontière, assimilant à une « erreur de communication, la version de la réouverture de la frontière.
L’équipe d’Abinader parle plutôt de « corridors commerciaux ».
Le journal EFE, dont le texte est repris par Acento.com.do, souligne ce qui suit.
« La présidence a publié ce matin une déclaration annonçant une série de mesures visant à renforcer la sécurité dans la zone frontalière, bloquée depuis le 15 septembre sur ordre du président dominicain Luis Abinader, en représailles à la construction d’un canal du côté haïtien dans la rivière frontalière Massacre, comme on l’appelle en Haïti (rivière Dajabón en République dominicaine). Les mesures, qui prévoient un corridor commercial provisoire, comprennent des contrôles avec enregistrement biométrique et une interdiction d’exporter des matériaux de construction, entre autres dispositions décidées aujourd’hui par le Conseil national de sécurité et incluses dans le communiqué de presse initial ».
Le journal fait remarquer que, « selon le contenu de la déclaration (le communiqué de presse), qui était accompagnée d’une vidéo du porte-parole du gouvernement dominicain, Homero Figueroa, ces décisions devraient accompagner la réouverture partielle de la frontière, qui restera fermée à la migration ».
Il souligne cependant, qu’après avoir envoyé aux médias plusieurs communiqués de presse corrigeant la date et l’heure de la réouverture supposée, qui étaient en désaccord avec ceux fournis dans le matériel audiovisuel, le personnel du département de la communication de la présidence a déclaré à EFE, par téléphone, que l’annonce était le résultat d’une erreur, sans déclaration officielle à ce sujet.
Le moins qu’on puisse dire, c’est que ce dossier donne des sueurs froides au président Luis Abinader qui semble avoir été très mal conseillé sur ce coup au point de ne plus savoir quel thème utiliser.
Vant Bèf Info (VBI)
Avec EFE