Éducation : Des milliers d’enfants privés d’écoles à cause de la violence

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Le chaos sécuritaire plonge le système éducatif haïtien dans une crise sans précédent. Des écoles incendiées, des enseignants menacés, des élèves déplacés : l’avenir de toute une génération est en péril.

Port-au-Prince, 30 avril 2025 –
Depuis le début de l’année, la violence armée a forcé la fermeture de centaines d’écoles à travers le pays. À Port-au-Prince, notamment dans les quartiers de Christ-Roi, Nazon et Carrefour-Feuilles, au moins 47 établissements scolaires ont été détruits rien qu’au mois de janvier, selon la représentante de l’UNICEF en Haïti, Geetanjali Narayan.
Certaines écoles sont devenues des repaires pour des groupes armés. À Mirebalais et à Saut-d’Eau, les attaques de mars et avril 2025 ont provoqué l’abandon massif des établissements scolaires. Beaucoup sont désormais en ruines, ou servent d’abris de fortune pour des déplacés internes.
Une crise éducative nationale
« Un enfant sur sept est aujourd’hui déscolarisé, et près d’un million risquent d’abandonner l’école dans les prochains mois », alerte Geetanjali Narayan. La représentante de l’UNICEF déplore une détérioration rapide du système éducatif, déjà fragile, menaçant directement le droit fondamental à l’éducation.
Des centaines d’enseignants ont quitté les zones les plus exposées. Depuis janvier 2024, plus de 2 000 professeurs auraient abandonné leurs postes, d’après les syndicats du secteur. Certains ont fui sous la menace, d’autres ont été victimes d’agressions. « J’ai laissé ma maison à Delmas 19 quand les tirs ont commencé. Même pour aller à l’école voisine, nous ne sommes plus en sécurité », témoigne Jean-Wilner Morand, instituteur déplacé.
Déplacements massifs, écoles improvisées
Selon l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), plus de 51 000 personnes ont été déplacées dans le Centre rien qu’à la mi-avril. À Boucan Carré ou Hinche, les écoles improvisées – installées sous des tentes ou dans des églises – peinent à accueillir les enfants dans de bonnes conditions. Le manque d’enseignants, de matériel et d’infrastructures creuse davantage les inégalités entre zones sinistrées et régions relativement épargnées, comme Pétion-Ville ou Cap-Haïtien.
Vers une génération sacrifiée ?
L’UNICEF appelle à une réponse d’urgence en matière d’éducation, face à ce qu’elle qualifie de « risque de perte d’une génération ». Pourtant, aucune stratégie nationale de relocalisation ou d’enseignement alternatif n’a été présentée à ce jour par le gouvernement. Malgré le chaos, les dates des examens officiels, notamment pour la 9e année fondamentale et la terminale, sont maintenues. Une décision qui accentue l’inquiétude chez de nombreux élèves vivant en situation de grande précarité.
Pour ces enfants déplacés, exposés à la violence, à la faim et aux maladies, l’école est devenue un rêve lointain – quand elle devrait être un droit fondamental.
Belly-Dave Bélizaire
Vant Bèf Info (VBI)