Un pays paralysé : entreprises, écoles et hôpitaux ferment leurs portes

Getting your Trinity Audio player ready...
|
L’onde de choc provoquée par la montée vertigineuse de l’insécurité à Port-au-Prince et dans plusieurs départements du pays, entraîne une vague inédite de fermetures d’établissements privés, d’institutions éducatives et de structures de santé. Face à l’incapacité de l’État à assurer un minimum de sécurité, un nombre croissant d’acteurs économiques, sociaux et humanitaires se voient contraints de suspendre leurs activités « jusqu’à nouvel ordre ».

Le secteur éducatif à l’agonie
Port-au-Prince, 26 avril 2025.- Parmi les premières victimes de cette crise sécuritaire, le secteur éducatif est en train de s’effondrer. À Port-au-Prince, plusieurs établissements emblématiques comme l’Institution Saint-Louis de Gonzague, le Petit Séminaire Collège Saint-Martial, le Collège Canado-Haïtien, le Collège Marie-Anne, l’Institution du Sacré-Cœur de Turgeau ou encore le Collège Roger Anglade ont fermé leurs portes en raison de la menace constante des gangs.
L’Université d’État d’Haïti (UEH) n’est pas épargnée : ses entités situées dans les zones sous tension comme l’avenue Christophe ont également cessé leurs activités. Dans les départements de l’Ouest et de l’Artibonite, près de 1 000 écoles ont été contraintes à la fermeture, privant ainsi quelque 300 000 élèves de leur droit fondamental à l’éducation.
La santé publique en détresse
Le chaos sécuritaire touche de plein fouet le système de santé déjà fragilisé. L’organisation humanitaire Médecins Sans Frontières (MSF) a suspendu ses opérations dans deux de ses centres médicaux de Port-au-Prince après que ses véhicules ont été attaqués. De leur côté, le Centre hospitalo-universitaire Saint-François-de-Sales et le Centre hospitalier Sainte-Marie ont également dû cesser leurs activités à cause des menaces et exactions armées. Le personnel médical est contraint d’évacuer, les patients sont abandonnés à eux-mêmes, et les habitants des quartiers affectés sont désormais sans accès aux soins les plus élémentaires.
Les entreprises privées au bord de l’asphyxie
Dans le secteur privé, la situation est tout aussi dramatique. Plusieurs entreprises telles que la Boulangerie Bon Accueil et les Laboratoires Farmatrix avaient été contraints de réduire, voire totalement suspendu leurs activités. Le Nouvelliste, principal quotidien du pays, ne peut plus imprimer ses journaux, ses presses ayant été vandalisées. De nombreuses autres structures ont été pillées, incendiées ou contraintes de cesser toutes activités.
La presse n’est pas épargnée. Radio Télévision Caraïbes (RTVC), a vu ses locaux de la ruelle Chavannes incendiés par des individus armés, forçant la station à interrompre ses émissions. Cette attaque contre l’un des médias les plus écoutés du pays, illustre la volonté des groupes armés de museler toute voix indépendante.
Une capitale verrouillée par les gangs
Selon des estimations récentes, 85 % du territoire de la capitale seraient aujourd’hui sous contrôle de groupes criminels, qui imposent leur loi, rançonnent, tuent et font régner la terreur. Les axes routiers stratégiques sont bloqués, les déplacements quasi impossibles, et l’État central tâtonne, essaie et tente d’apporter une réponse mais semble impuissant, pour l’instant, à enrayer cette spirale de violence.
L’insécurité n’est plus une menace ponctuelle, mais une réalité systémique, qui désorganise le fonctionnement même de la société. À l’arrêt, paralysée, prise en otage, la nation attend un sursaut. Car sans sécurité, il n’y a ni école, ni hôpital, ni entreprise, ni avenir.
Wandy CHARLES
Vant Bef Info (VBI)