Plan silencieux des gangs : «ceinturer» la capitale haïtienne

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Une série d’affrontements meurtriers a secoué, ce mercredi, plusieurs zones stratégiques de la capitale haïtienne. Pacot, Haut Turgeau, ainsi que Kenscoff ont été le théâtre de violences extrêmes opposant bandits armés à des brigadiers et les forces de l’ordre. Derrière cette flambée de violence, se dessine une stratégie macabre mais cohérente : asphyxier le cœur de Port-au-Prince et encercler les hauteurs urbaines encore hors d’atteinte.

Port-au-Prince, 23 avril 2025. – Depuis plusieurs mois, les attaques menées par les groupes criminels ne relèvent plus de simples affrontements sporadiques. Elles traduisent une offensive planifiée visant à : verrouiller les axes majeurs de circulation et d’approvisionnement (Carrefour de l’Aéroport, Delmas 30, etc.) ; encercler les zones encore relativement stables, notamment Pétion-Ville, Canapé-Vert et Haut Delmas ; instaurer un blocus social et économique, forçant l’exode de la population et la paralysie des services. Les événements de ce 23 avril ne sont qu’un fragment d’un dessein plus vaste : fermer la boucle territoriale autour de la capitale. Il s’agit, selon plus d’un, du plan silencieux des gangs.

Pacot et Haut Turgeau : embuscade meurtrière contre les brigadiers

En début d’après-midi, des combats violents ont éclaté à Pacot et Haut Turgeau. Des brigadiers venus de Canapé-Vert, appuyés par ceux d’autres zonez, tentaient de reprendre le contrôle de ces quartiers tombés sous la menace. Mais l’opération a tourné au carnage. Pris dans une embuscade, plusieurs brigadiers ont été tués, d’autres grièvement blessés. Les images circulant sur les réseaux sociaux sont d’une brutalité insoutenable.
Les assaillants, lourdement armés, ont opposé une résistance féroce, transformant les rues en zones de guerre. La panique s’est répandue dans tout Turgeau, forçant écoles, entreprises et cliniques à fermer leurs portes.

Kenscoff en flammes : les hauteurs ne sont plus épargnées

Le même jour, à Kenscoff, commune perchée au sud-est de la capitale, des policiers ont été attaqués alors qu’ils patrouillaient. Plusieurs agents ont été blessés et un véhicule blindé de la PNH incendié. Les autorités locales peinent à contenir l’incursion de ces groupes qui cherchent manifestement à prendre le contrôle des voies d’accès aux quartiers résidentiels situés plus en altitude.

Delmas 30 et Carrefour de l’Aéroport : la paralysie organisée

Au Carrefour de l’Aéroport, un carrefour vital reliant divers quartiers de la capitale, les combats entre la PNH et les gangs continuent. La zone est toujours sous haute tension, avec des tirs réguliers et une circulation pratiquement à l’arrêt. Les populations continuent de fuir massivement. L’exode s’intensifie, les familles cherchant désespérément refuge vers Haut Delmas ou d’autres zones encore épargnées.

Selon les données des Nations Unies, 85 % de la région métropolitaine de Port-au-Prince est désormais sous contrôle ou influence de gangs armés. Hôpitaux, écoles, tribunaux : rien n’est épargné. Chaque jour, de nouvelles zones tombent. Chaque jour, la boucle se resserre. On est en face d’une capitale en lambeaux. Ce que révèle cette dynamique, c’est l’incapacité structurelle de l’État à contenir, encore moins à inverser, cette occupation rampante. Mais plus inquiétant encore : le sentiment que la capitale est livrée à elle-même, prise en étau entre les assauts des criminels et le manque résultats des institutions concernées.

Les tragédies de ce mercredi 23 avril doit résonner comme un avertissement. Sans une réponse concertée, planifiée et dotée de moyens conséquents, Port-au-Prince risque de devenir un territoire entièrement centré par les gangs, une capitale effondrée sous les assauts conjugués de la terreur et de l’abandon.

Wandy CHARLES
Vant Bef Info(VBI)

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