Les cerfs-volants de Pâques : une tradition en voie de disparition
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À l’approche de la fête de Pâques, une tradition qui a longtemps marqué les festivités en Haïti, les cerfs-volants, symboles de joie et de créativité, deviennent de plus en plus rares. Ce phénomène, autrefois incontournable, subit de plein fouet les effets de l’insécurité grandissante qui mine le pays.

Port-au-Prince, 17 avril 2025 – Depuis des générations, la confection et le vol de cerfs-volants étaient un rituel durant les fêtes pascales. Petits et grands se retrouvaient sur les balcons, les collines ou dans des espaces dégagés pour faire voler ces créations faites de bambou, de ficelle et de papier coloré. Les cerfs-volants étaient bien plus qu’un simple divertissement : ils incarnaient l’ingéniosité, la liberté et l’esprit joyeux de la jeunesse haïtienne.
Aujourd’hui, cette tradition souffre. L’insécurité qui frappe plusieurs régions du pays a considérablement limité la possibilité pour les enfants de se rassembler en plein air. Ce qui était autrefois un spectacle animé de cerfs-volants multicolores, est désormais remplacé par le silence et la peur.
La situation s’est aggravée avec la montée du banditisme. De nombreux quartiers, jadis animés par des rires d’enfants et des jeux, sont aujourd’hui devenus des zones à risques où il est presque impossible de sortir en toute sécurité. Les parents, inquiets pour leurs enfants, leur interdisent désormais de monter sur les balcons, de peur que des balles perdues ne les atteignent.
Cependant, malgré ces difficultés, quelques bastions résistent. À la rue Colicot, dans le quartier de la route Neuf, dans la plaine du Cul-de-Sac, un groupe d’enfants se rassemble chaque après-midi à 16 heures pour faire voler leurs cerfs-volants. L’animation et la joie y sont encore palpables. Le “grandon”, l’un des cerfs-volants les plus grands, nécessite l’aide de trois enfants pour maintenir la ficelle tendue. Une fois dans le ciel, il flotte majestueusement, avec sa queue suivant les mouvements du vent.
Pour ces enfants, les cerfs-volants ne sont pas seulement un jeu ; ils symbolisent l’espoir et la liberté. Dans un contexte où les espaces publics se transforment en zones de conflit, comme le Champ de Mars, autrefois un lieu de rassemblement pour les étudiants et les enfants, les cerfs-volants deviennent un moyen de résister et de rêver à un avenir meilleur.
Aujourd’hui, bien que ces petites réalisations en papier ne dominent plus le ciel haïtien comme avant, elles restent un héritage précieux, témoignant de la résilience et de la créativité d’un peuple. Restaurer la sécurité et l’accès à ces espaces de loisirs serait un premier pas pour redonner vie à cette tradition en danger, et permettre aux générations futures de renouer avec cette part importante de leur culture.
Likenton Joseph
Vant Bèf Info (VBI)