222 ans après la création du bicolore : Où est passée l’union ?

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Par Wandy CHARLES
Le 18 mai 1803, à l’aube de l’indépendance, les mains de Catherine Flon cousaient les morceaux bleu et rouge d’un rêve commun. Ce jour-là, l’union ne fut pas qu’un mot : elle était chair, volonté, combat. Deux siècles plus tard, alors que le drapeau s’apprête à flotter à nouveau dans les écoles, les rues et les places publiques à l’occasion de cette fête nationale, une question poignante s’impose : où est passée cette union sacrée qui nous a donné naissance ?

Haïti, pays déchiré, se débat dans une fragmentation sans fin. Les clivages sociaux se creusent, les inégalités économiques s’accentuent. L’idéal d’égalité, jadis porté par nos ancêtres, est aujourd’hui trahi par la réalité d’un peuple abandonné, livré à lui-même. Le drapeau, ce symbole de dignité arrachée au prix du sang, est souillé chaque jour davantage par l’égoïsme des élites, le laxisme des dirigeants, et la dépravation d’une jeunesse.
Dans les quartiers assiégés par la violence, des Haïtiens tuent leurs frères, non par haine, mais sous l’emprise d’un chaos programmé, orchestré par une main cynique et invisible. Une tragédie à huis clos, où la folie s’installe comme unique loi. Pendant ce temps, sur la scène politique, les protagonistes de la transition s’empêtrent dans des luttes de pouvoir stériles, incapables de produire ce contrat social tant attendu qui pourrait sortir le pays du bourbier. À croire que les héros ont combattu en vain.
Et pourtant, l’histoire, si on daigne l’écouter, nous tend la main. Elle nous murmure les noms de Dessalines, Pétion, Christophe et Capois. Elle nous rappelle que l’union, pour être féconde, exige courage, dépassement et vision. Le drapeau n’est pas un ornement de fête. Il est le témoin d’un serment : celui de construire une nation libre (ou mourir), juste et solidaire.
Aujourd’hui, plus que jamais, les fils et les filles d’Haïti ont le devoir de réinventer l’union. Non pas en copiant servilement le passé, mais en puisant dans sa flamme pour bâtir une nouvelle espérance. Une union moderne, éclairée, responsable. Une union qui refuse le fatalisme et embrasse l’audace. Une union qui redonne au drapeau sa dignité et à la nation son souffle. Car refonder Haïti n’est pas une option. C’est une urgence. Et c’est ensemble, ou jamais, que nous y parviendrons.
Vant Bef Info (VBI)