12 janvier 2010 : 15 ans après, entre ruines et désillusions
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Le séisme du 12 janvier 2010 reste gravé dans la mémoire collective haïtienne comme l’une des plus grandes tragédies nationales. Quinze ans après, le pays peine encore à se relever de cette catastrophe qui a causé la mort de centaines de milliers de personnes, laissant Port-au-Prince et ses environs en ruines. Si des avancées ont été réalisées, les défis liés aux risques sismiques et à la reconstruction demeurent immenses.
Un bilan sismique préoccupant
Port-au-Prince, le 12 janvier 2025 – Le rapport annuel du Bureau des Mines et de l’Énergie (BME) pour 2024 a recensé 628 secousses sismiques en Haïti, une baisse par rapport aux 828 séismes enregistrés en 2023. Toutefois, cette diminution ne traduit pas une réduction des risques. Avec des magnitudes oscillant entre 0,6 et 5, les secousses restent fréquentes et particulièrement inquiétantes durant les mois de mai et d’octobre.
Le séisme le plus fort de l’année écoulée, d’une magnitude de 5, a frappé la région des Nippes, près de Lazile, rappelant brutalement que le danger est toujours présent. Pour les spécialistes, cette situation souligne l’urgence d’adopter des mesures concrètes pour renforcer la résilience du pays face aux catastrophes naturelles.
Des réformes insuffisantes face aux défis
Depuis le drame de 2010, certaines initiatives ont vu le jour pour encadrer la construction en Haïti. L’adoption du Code National du Bâtiment d’Haïti (CNBH) et les travaux de microzonage sismique constituent des pas en avant, mais ils restent insuffisants face à l’ampleur des défis.
L’ingénieur Lolendo Neptune déplore une urbanisation anarchique qui continue d’exposer des milliers de familles à des risques majeurs. « Malgré les réglementations en place, les constructions parasismiques ne sont pas systématiquement respectées. Beaucoup construisent encore dans des zones à risques sans permis ni supervision technique », explique-t-il.
Selon Neptune, l’absence de politiques publiques cohérentes et la faiblesse de l’État sont les principaux obstacles à une gestion efficace des risques sismiques.
Du séisme au désastre humanitaire prolongé
Le tremblement de terre de 2010 n’a pas seulement été un désastre naturel, il a révélé les failles profondes de la gouvernance haïtienne. Dourason Charles, étudiant en sciences politiques au Nouveau Collège d’Études Politiques (NCEP) de Paris, souligne que cette catastrophe a exacerbé les faiblesses structurelles du pays.
« L’État haïtien a montré son incapacité à répondre aux besoins de base de sa population, notamment en matière de logement, d’infrastructures et de services publics essentiels. Quinze ans après, la situation reste critique », affirme-t-il.
Pour Charles, la dépendance chronique à l’aide internationale est une impasse. « Les fonds de reconstruction n’ont pas toujours été utilisés de manière efficace. La corruption et le manque de transparence ont miné les efforts de relèvement. Il est urgent de privilégier une gouvernance responsable et des politiques de développement durable. »
Un avenir toujours incertain
Quinze ans après le séisme, Haïti reste à la croisée des chemins. Si des progrès sont à saluer, notamment dans la formation des professionnels du bâtiment et la sensibilisation aux risques, le pays demeure vulnérable face aux catastrophes naturelles.
La véritable leçon du 12 janvier 2010 n’a pas encore été pleinement intégrée. Sans une gouvernance plus forte et des infrastructures adaptées, Haïti continuera de vivre dans l’ombre de ce séisme, symbole d’une tragédie nationale qui reste, pour beaucoup, une plaie béante.
Judelor Louis Charles
Vant Bèf Info (VBI)